[Okfn-ca] Fwd: :: S.I.Lex :: Deux enjeux stratégiques dans la nouvelle version 4.0 des Creative Commons : Open Data et clause Non-Commerciale
Diane Mercier
diane.mercier at gmail.com
Sun Dec 1 18:35:13 UTC 2013
PVI
-------- Message original --------
Sujet: :: S.I.Lex ::
Date : Sat, 30 Nov 2013 23:16:20 +0000
De : :: S.I.Lex :: <calimaq at gmail.com>
Pour : diane_mercier at consultus.qc.ca
:: S.I.Lex ::
:: S.I.Lex :: <http://scinfolex.com>
------------------------------------------------------------------------
Deux enjeux stratégiques dans la nouvelle version 4.0 des Creative
Commons : Open Data et clause Non-Commerciale
<http://feedproxy.google.com/%7Er/http/scinfolexwordpresscom/%7E3/SeRDCVJ0stE/?utm_source=feedburner&utm_medium=email>
Posted: 30 Nov 2013 07:49 AM PST
Cette semaine, après un processus d’élaboration de plus de deux ans,
Creative Commons International a annoncé
<http://creativecommons.org/weblog/entry/40935> la publication de la
nouvelle version 4.0 de ses licences. Framablog a déjà traduit en
français un article
<http://www.framablog.org/index.php/post/2013/11/28/creative-commons-4>
d’une des responsables de l’organisation, Diane Peter, qui explique les
principales modifications par rapport à la version 3.0 remontant à 2007.
Creative Commons a travaillé par exemple pour simplifier le texte des
licences afin de les rendre plus compréhensibles ; les licences auront
également un effet plus global, car elles n’auront plus désormais à être
transposées pays par pays et des clarifications intéressantes ont été
apportées, notamment en ce qui concerne l’attribution des auteurs et
l’adaptation des oeuvres.
Creative Commons. Par Skley. CC-BY-ND. Source : Flickr.
Mais je voudrais dans ce billet revenir sur ce qui constitue à mon sens
les deux points les plus importants à souligner dans cette nouvelle
version des Creative Commons. Le premier est qu’à présent, les licences
prennent en compte le droit des bases de données, ce qui les rend
applicables dans le cadre de projets d’Open Data, alors que c’était
difficilement le cas auparavant. Par ailleurs, la clause NC, qui permet
aux auteurs de réserver les usages non-commerciaux d’une oeuvre, a été
maintenue, alors qu’un débat assez vif
<http://creativecommons.org/weblog/entry/35773> avait agité la
communauté pour savoir s’il fallait ou non la supprimer. J’étais
d’ailleurs moi-même intervenu
<http://scinfolex.com/2012/10/19/defense-et-illustration-de-la-clause-non-commerciale/>
dans cette discussion côté français, pour me prononcer en faveur du
maintien. Cette clause a finalement été conservée, mais sans
modification, ce qui n’est sans doute pas complètement satisfaisant.
*Des licences Creative Commons applicables dans le cadre de l’Open Data*
Jusqu’à présent, les licences Creative Commons n’étaient pas
véritablement applicables aux bases de données, du moins de ce côté-ci
de l’Atlantique. En effet le droit spécifique reconnu aux producteurs de
bases de données est une particularité européenne, découlant d’une
directive européenne de 1996
<http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CELEX:31996L0009:fr:HTML>.
Il n’existe pas comme tel aux États-Unis par exemple, qui considèrent
plutôt les bases de données comme des compilations et les protègent par
le copyright uniquement lorsqu’elles sont originales
<https://en.wikipedia.org/wiki/Sui_generis_database_right#United_States>.
La démarche d’ouverture des données, qui caractérise l’Open Data,
implique que les producteurs de bases expriment leur intention de
permettre la réutilisation par le biais d’une licence. Dans certains
pays, comme l’Australie <http://data.gov.au> ou la Nouvelle Zélande
<https://data.govt.nz> par exemple, le choix a été fait d’utiliser les
Creative Commons au niveau des portails gouvernementaux de diffusion des
données publiques.
Comme les Creative Commons ne prenaient pas en compte le droit des bases
de données, la démarche a été différente dans plusieurs pays d’Europe,
comme l’Angleterre, qui la première a créé une Open Government Licence
<http://www.nationalarchives.gov.uk/doc/open-government-licence/version/2/>
spécialement pour l’ouverture des données publiques. La France a fait de
même de son côté avec la Licence Ouverte/Open Licence
<http://www.etalab.gouv.fr/pages/licence-ouverte-open-licence-5899923.html>,
mise en place par Etalab qui est l’équivalent d’une licence CC-BY, mais
adaptée au cadre législatif français de la réutilisation des données
publiques.
Les projets communautaires ont eux-aussi parfois ressenti des
difficultés dans l’utilisation des Creative Commons appliqués aux bases
de données. C’est notamment ce qui avait motivé le choix de la
communauté OpenStreetMap de passer en 2012
<https://en.wikipedia.org/wiki/Open_Database_License> d’une licence
CC-BY-SA à la licence OdbL <http://opendatacommons.org/licenses/odbl/>
(Open Database Licence), proposée par l’Open Knowledge Foundation et
mieux adaptée aux bases de données. Cette licence, qui présente
l’intérêt d’appliquer une clause de partage à l’identique à la
réutilisation des données est également employée par un nombre
significatif de collectivités territoriales en France, notamment la
Ville de Paris qui fut la première à la retenir et qui l’a traduite en
français <http://opendata.paris.fr/opendata/jsp/site/Portal.jsp?page_id=10>.
Creative Commons avait jusqu’à présent peut-être mal négocié le virage
de l’Open Data et cette version 4.0 va permettre à ces licences de jouer
un rôle sur ce terrain. Il va être intéressant à présent de voir quel va
être l’effet concret de cette modification. Le paysage français, après
une certaine incertitude sur les licences qui a duré plusieurs années,
s’est peu à peu structuré
<http://www.lagazettedescommunes.com/208893/le-fouilli-des-licences-open-data-seclaircit-fiche-pratique/>
autour de la Licence Ouverte et de l’ODbL, entre lesquels se
répartissent l’essentiel des projets d’ouverture des données. Certains
acteurs vont-ils à présent opter pour les Creative Commons pour ouvrir
leurs données ?
J’aurais tendance à voir plusieurs avantages aux Creative Commons. Ils
sont déjà plus connus et constituent l’un des "standards" du web. Par
ailleurs, les CC sont désormais aussi bien applicables à des bases de
données qu’à des contenus (oeuvres) et il est intéressant de pouvoir
couvrir par une même licence ces deux types d’objets. Par exemple,
imaginons un projet de recherche qui veuille ouvrir ses résultats à la
réutilisation. Il pourra maintenant utiliser une seule licence Creative
Commons, à la fois pour les articles ou les images produits dans le
cadre du projet (oeuvres) et pour les données de recherche collectées à
cette occasion, alors qu’avant il aurait fallu deux licences
différentes, une pour les oeuvres et une autre pour les données.
Un point important cependant sera de comparer les Creative Commons
(notamment la CC-BY-SA) et l’ODbL pour déterminer si l’effet du partage
à l’identique est le même ou non dans les deux licences. C’est une
question complexe à propos de laquelle j’avoue ne pas m’être fait encore
une religion.
Enfin, mais c’est essentiel, toutes les licences Creative Commons ne
seront pas utilisables dans le cadre de projets d’Open Data. Les
licences comportant une clause NC (Non Commercial) ou ND (Pas de
modification) sont incompatibles avec une vraie démarche d’Open Data, si
l’on se réfère notamment à l’Open Definition <http://opendefinition.org>
mise en place par l’open Knowledge Foundation.
Esta es la primera camiseta de Creative Commons Colombia. Par Colores
Mari. CC-BY. Source : Flickr
*Maintien de la clause Non-Commerciale, mais sans modification.*
La clause Non-Commerciale, qui permet à un auteur d’autoriser via la
licence la réutilisation de ses oeuvres, mais uniquement dans une sphère
non-marchande, est depuis longtemps la cause de tensions au sein de la
communauté de la Culture Libre. Il est vrai que ce fut un débat
fondateur de l’émergence du logiciel libre que de permettre les usages
commerciaux et de forger des licences, comme la GNU-GPL
<http://www.gnu.org/licenses/gpl-2.0.html> qui octroient et garantissent
cette liberté aux réutilisateurs. Mais ce fut aussi l’une des
spécificités des Creative Commons de proposer à la fois des licences
libres (CC-BY, CC-BY-SA) et des licences de libre diffusion
<https://fr.wikipedia.org/wiki/Licence_de_libre_diffusion>plus
restrictives (CC-BY-NC, CC-BY-ND, CC-BY-NC-NC et CC-BY-NC-SA) pour
fournir davantage d’options aux créateurs.
Or au cours du processus d’élaboration de la nouvelle version 4.0,
plusieurs voix se sont élevées
<http://creativecommons.org/weblog/entry/35773> pour demander à Creative
Commons de supprimer la possibilité de retenir ces options. Ce fut le
cas notamment de l’Open Knowledge Foundation, par le biais de l’un de
ses co-fondateurs Rufus Pollock
<http://blog.okfn.org/2012/10/04/making-a-real-commons-creative-commons-should-drop-the-non-commercial-and-no-derivatives-licenses/>,
qui avançait l’argument que les licences empêchant la réutilisation
commerciale ou la modification ne permettaient pas de constituer des
biens communs (position que j’ai eu l’occasion de critiquer
<http://pages.citebite.com/c2m3m8p7t8ygd> du point de vue de théorie des
biens communs elle-même).
Toujours est-il que Creative Commons a essayé de proposer plusieurs
aménagements, pour tenir compte de ce point de vue. Notamment, il avait
été envisagé de renommer la clause Non-Commercial en "Usage commercial
réservé", car le NC ne signifie pas que l’usage commercial de l’oeuvre
est impossible, mais qu’il est soumis à l’autorisation préalable de
l’auteur. Néanmoins cette option n’a finalement pas été retenue
<http://creativecommons.org/weblog/entry/36725>. Des améliorations ont
cependant été apportées <http://creativecommons.org/weblog/entry/40144>
pour que les auteurs visualisent plus clairement la différence entre les
licences "libres" et celles qui ne le sont pas parmi les CC.
Au final donc, la clause NC a été reconduite à l’identique et
personnellement, je pense que c’est une bonne décision. Je n’ai jamais
défendu l’idée que toutes les oeuvres devaient être placées sous NC,
mais dans ma réflexion concernant les modèles économiques, j’ai souvent
constaté que la clause NC pouvait être utile à certains créateurs pour
tirer revenu de leurs oeuvres , tout en permettant leur réutilisation
dans un certain périmètre. Je suis pour que les licences Creative
Commons offrent un maximum d’options aux auteurs afin que chacun puisse
développer une stratégie adaptée à sa pratique et à son but.
Si je me réjouis donc de la décision de Creative Commons de maintenir le
NC, je déplore cependant qu’il ait été maintenu à l’identique. La clause
est en effet rédigée ainsi :
L’Acceptant ne peut exercer aucun des droits qui lui ont été
accordés à l’article 3 d’une manière telle qu’il aurait l’intention
première ou l’objectif d’obtenir un avantage commercial ou une
compensation financière privée.
Beaucoup critiquent
<http://www.framablog.org/index.php/post/2012/10/15/non-commercial-creative-commons>
cette formulation en disant qu’elle est trop complexe et trop vague.
Personnellement, je n’ai jamais été d’accord avec ce jugement. La clause
telle qu’elle est rédigée me paraît relativement claire, mais elle
possède surtout une portée très large, puisqu’elle inclut dans la
"commercialité" le simple fait "/d’obtenir un avantage commercial/",
au-delà du fait de recevoir une rémunération sous forme financière.
Plusieurs propositions intéressantes
<http://wiki.creativecommons.org/4.0/NonCommercial> ont été faites au
cours du processus d’élaboration des 4.0 pour reformuler cette
clause. Certains par exemple avait proposé de mieux délimiter sa portée
pour en exclure certains usages (exemples : les usages pédagogiques
payants ou la rémunération par la publicité). Mais ces discussions n’ont
pas pu aboutir, en grande partie à cause de la crispation engendrée par
le demande de suppression de la clause émise par une partie de la
communauté.
Nous sommes pourtant plusieurs à penser qu’il faut à présent se tourner
vers une approche plus fine des usages commerciaux et cesser de tout
mettre dans un même panier. Silvère Mercier a écrit notamment un billet
important intitulé "Pour une approche complexe des usages marchands des
biens communs de la connaissance
<http://www.bibliobsession.net/2012/11/14/pour-une-approche-complexe-des-usages-marchands-des-biens-communs-de-la-connaissance/>"
qui détaille bien cet enjeu d’une meilleure appréhension de ce qui doit
être considéré comme commercial ou non. Un angle d’attaque
particulièrement intéressant est celui de la "lucrativité limitée" que
l’on voit se développer dans le secteur de l’Economie Sociales et
Solidaire (ESS), par exemple, qui prouve que tous les acteurs
commerciaux ne sont pas assimilables. Peut-être faudra-t-il pour prendre
en compte cette complexité se tourner vers d’autres instruments
juridiques, comme la Peer Production Licence
<http://scinfolex.com/2012/11/10/peer-production-licence-une-licence-concue-pour-les-biens-communs/>,
dont j’avais parlé l’année dernière.
Mieux cerner la distinction entre le commercial et le non-commercial
constitue aussi un enjeu majeur si l’on veut arriver à une légalisation
du partage des oeuvres en ligne, car les principales propositions qui
sont faites en ce sens reposent sur l’idée d’une légalisation des
échanges dans une sphère non-marchande seulement, ce qui suppose qu’on
soit à même d’en donner une définition
<http://paigrain.debatpublic.net/?p=4203>. Et cette question concerne à
présent aussi Creative Comons directement, puisque l’organisation s’est
récemment prononcée en faveur d’une réforme globale du droit d’auteur
<http://scinfolex.com/2013/10/17/creative-commons-se-prononce-pour-une-reforme-globale-du-droit-dauteur/>.
Classé dans:Alternatives : Copyleft et Culture Libre
<http://scinfolex.com/category/alternatives-copyleft-et-culture-libre/>,
Données publiques et Open Data
<http://scinfolex.com/category/donnees-publiques-et-open-data/> Tagged:
Creative Commons <http://scinfolex.com/tag/creative-commons/>, données
publiques <http://scinfolex.com/tag/donnees-publiques/>, licences
<http://scinfolex.com/tag/licences/>, licences libres
<http://scinfolex.com/tag/licences-libres/>, modèles économiques
<http://scinfolex.com/tag/modeles-economiques/>, non commercial
<http://scinfolex.com/tag/non-commercial/>, open data
<http://scinfolex.com/tag/open-data/>, partage
<http://scinfolex.com/tag/partage/>
You are subscribed to email updates from :: S.I.Lex ::
<http://scinfolex.com>
To stop receiving these emails, you may unsubscribe now
<http://feedburner.google.com/fb/a/mailunsubscribe?k=hJr-Yaz4pbO9cqOpmJLDcM1Rxmg>.
Email delivery powered by Google
Google Inc., 20 West Kinzie, Chicago IL USA 60610
--- Médiation par | Curation by ---
Dre Diane Mercier
@okfnca | ca.okfn.org
@_FACiL | facil.qc.ca
@MTL_DO | donnees.ville.montreal.qc.ca
@carnetsDM | dianemercier.com
http://about.me/dianemercier
-------------- next part --------------
An HTML attachment was scrubbed...
URL: <http://lists.okfn.org/pipermail/okfn-ca/attachments/20131201/306998b4/attachment-0002.html>
More information about the okfn-ca
mailing list