[Okfn-ca] [okfn-ca][CivicAccess-discuss] Open Access: to the land
Normand Choinière
choiniere.normand at gmail.com
Mon Jun 3 04:42:17 UTC 2013
Je fais suite, à la demande de Diane Mercier, aux préoccupations de Glen
Newton sur l'accès aux terres publiques et privées en Amérique du Nord
et plus particulièrement au Québec.
L'élément clef qui explique la restriction d'accès aux terres privées au
Québec est, selon moi, lié à l'exercice de la chasse et de la pêche en
particulier. Il faut comprendre l'importance de ces activités vitales au
début de la colonie et, pour plusieurs, jusqu'à la première moitié du
20ième siècle. J'ai personnellement connu plusieurs personnes qui
dépendaient de la chasse au niveau de leur alimentation. Un de mes
compagnons de chasse chassait, jeune, presqu'en toutes saisons, mais
particulièrement, des cerfs de Virginie sur les terres de la famille aux
fins de l'alimentation. Il faut aussi comprendre qu'au début du 20ième
siècle et pour une bonne partie de ce siècle près de 75% de la
population vivait hors des villes.
Comme nul autre que le Gouvernement du Québec (et dans quelques secteurs
ou domaines le Gouvernement fédéral) ne peut régir la chasse et la
pêche, les propriétaires des terres restreignent ou empêchent la chasse
et la pêche indirectement par le biais de l'accès. On ne peut empêcher
quelqu'un de chasser et pêcher sur ses terres mais on peut l'empêcher
d'y mettre le pied cependant.
La chasse, devenue sportive (comme la pêche) depuis les années 1950, ces
mêmes terres sont toujours aussi convoitées de nos jours. Les jeunes des
zones urbaines ne réalisent probablement pas l'importance de la chasse
et la pêche, encore aujourd'hui pour de très nombreux Québécois. Notons
toutefois que les baby-boomers sont la dernière cohorte pour qui prime
encore ces activités. Par contre, ces activités étaient surtout
réservées aux hommes. Les choses changent toutefois et des femmes, de
plus en plus nombreuses se retrouvent en forêt. Les activités de loisirs
comme la chasse et la pêche ou encore la trappe ne sont pas à la veille
de disparaître. Elles resteront importantes pour de nombreux Québécois
de souche, les immigrants récents viennent souvent de régions du monde
moins engagées dans de telles activités et ne constituent qu'une bien
faible réserve. J'ai dirigé des centres hospitaliers au Québec et j'ai
pu noter, dans les régions non urbaines, une baisse significative des
activités hospitalières durant les périodes concernées, baise qui m'a
étonnée moi-même. Ni les patients ni les traitants n'étaient au
rendez-vous, la chasse ou la pêche l'emportant alors comme priorité sur
la maladie!
On se rappellera que jusqu'en 1976 de nombreux territoires publics
étaient l'objet de baux à des "Clubs" privés de chasse et de pêches, ces
"clubs" avaient un membership privé et sélectif. Depuis, ces territoires
ont été remis à des "clubs" d'une autre forme, des "clubs" plus ouverts
au niveau du membership (Zones d'exploitation contrôlée - ZEC) mais qui
conservent toujours des droits exclusifs d'usage au fin de la chasse et
de la pêche et où sont implantés des bâtiments privés et autres
dispositifs accessoires.
D'autres territoires privés sont aussi, encore aujourd'hui, mis à la
disposition d'associations de chasse et pêche, contre rémunération par
des propriétaires terriens, je pense à la vaste région des Cantons de
l'Est où l'accès public aux terres est ainsi limité.
De plus, de nombreux territoires (publics et privés) du sud du Québec
sont confiés à des pourvoiries lesquelles les exploitent, comme
entreprises, aux fins de la chasse et de la pêche ou pour des activités
sportives ou récréatives de toute nature.
Je souligne aussi que des activités récréatives ont cours impliquant des
véhicules comme le quad et la motoneige. Encore là, les propriétaires
terriens exercent leurs droit de permettre ou ne pas permettre l'accès à
leurs terres.
Il y a, il ne faut pas oublier que plusieurs territoires sont sous une
forme de juridiction amérindienne. C'est ainsi que la Convention de la
Baie de James leur en confie l'exclusivité en matière de chasse et pêche
et plus largement dans le domaine récréo-touristique de sorte que
personne ne peut avoir accès à ces activités ni aux territoires où elles
s'exercent sans être encadrés d'une façon ou d'une autre (pourvoiries,
guides etc.) par des Amérindiens ou Inuits.
Compte tenu de la culture, des valeurs, de la tradition de nombreux
Québécois, particulièrement ceux de souche francophone et des
populations autochtones, il est difficilement imaginable qu'un "libre
accès à la terre" pour tous puisse être envisageable. Ce principe ne
fait non seulement pas partie des moeurs des populations locales mais
il s'oppose même à des valeurs établies depuis plusieurs centaines d'années.
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